Perrault-contes.pdf

(443 KB) Pobierz
Charles Perrault
Contes de ma mère l’Oye
Be Q
1058324383.001.png
Charles Perrault
1628-1703
Contes de ma mère l’Oye
La Bibliothèque électronique du Québec
Collection À tous les vents
Volume 61 : version 1.02
2
Contes de ma mère l’Oye
Édition de référence :
Éditions Rencontre, 1968.
Illustration de couverture : Gustave Doré.
3
Peau d’âne
Il était une fois un roi si grand, si aimé de ses
peuples, si respecté de tous ses voisins et de ses
alliés, qu’on pouvait dire qu’il était le plus
heureux de tous les monarques. Son bonheur était
encore confirmé par le choix qu’il avait fait d’une
princesse aussi belle que vertueuse; et les
heureux époux vivaient dans une union parfaite.
De leur mariage était née une fille, douée de tant
de grâce et de charmes, qu’ils ne regrettaient pas
de n’avoir pas une plus grande lignée.
La magnificence, le goût et l’abondance
régnaient dans son palais ; les ministres étaient
sages et habiles ; les courtisans, vertueux et
attachés ; les domestiques, fidèles et laborieux ;
les écuries, vastes et remplies des plus beaux
chevaux du monde, couverts de riches
caparaçons : mais ce qui étonnait les étrangers
qui venaient admirer ces belles écuries, c’est
4
qu’au lieu le plus apparent un maître âne étalait
de longues et grandes oreilles. Ce n’était pas par
fantaisie, mais avec raison, que le roi lui avait
donné une place particulière et distinguée. Les
vertus de ce rare animal méritaient cette
distinction, puisque la nature l’avait formé si
extraordinaire que sa litière, au lieu d’être
malpropre, était couverte, tous les matins, avec
profusion, de beaux écus au soleil et de louis d’or
de toute espèce, qu’on allait recueillir à son
réveil.
Or, comme les vicissitudes de la vie s’étendent
aussi bien sur les rois que sur les sujets, et que
toujours les biens sont mêlés de quelques maux,
le Ciel permit que la reine fût tout à coup
attaquée d’une âpre maladie, pour laquelle,
malgré la science et l’habileté des médecins, on
ne put trouver aucun secours. La désolation fut
générale. Le roi, sensible et amoureux, malgré le
proverbe fameux qui dit que l’hymen est le
tombeau de l’amour, s’affligeait sans modération,
faisait des vœux ardents à tous les temples de son
royaume, offrait sa vie pour celle d’une épouse si
chère ; mais les dieux et les fées étaient invoqués
5
Zgłoś jeśli naruszono regulamin