Georges Brassens Les deux oncles -------------------------------------------------------------------------------- C'�tait l'oncle Martin, c'�tait l'oncle Gaston L'un aimait les Tommies, l'autre aimait les Teutons Chacun, pour ses amis, tous les deux ils sont morts Moi, qui n'aimais personne, eh bien ! je vis encor Maintenant, chers tontons, que les temps ont coul� Que vos veuves de guerre ont enfin convol� Que l'on a requinqu�, dans le ciel de Verdun Les �toiles ternies du mar�chal P�tain Maintenant que vos controverses se sont tues Qu'on s'est bien partag� les cordes des pendus Maintenant que John Bull nous boude, maintenant Que c'en est fini des querelles d'Allemand Que vos fill's et vos fils vont, la main dans la main Faire l'amour ensemble et l'Europ' de demain Qu'ils se soucient de vos batailles presque autant Que l'on se souciait des guerres de Cent Ans On peut vous l'avouer, maintenant, chers tontons Vous l'ami les Tommies, vous l'ami des Teutons Que, de vos v�rit�s, vos contrev�rit�s Tout le monde s'en fiche � l'unanimit� De vos �purations, vos collaborations Vos abominations et vos d�solations De vos plats de choucroute et vos tasses de th� Tout le monde s'en fiche � l'unanimit� En d�pit de ces souvenirs qu'on comm�mor' Des flammes qu'on ranime aux monuments aux Morts Des vainqueurs, des vaincus, des autres et de vous R�v�rence parler, tout le monde s'en fout La vie, comme dit l'autre, a repris tous ses droits Elles ne font plus beaucoup d'ombre, vos deux croix Et, petit � petit, vous voil� devenus L'Arc de Triomphe en moins, des soldats inconnus Maintenant, j'en suis s�r, chers malheureux tontons Vous, l'ami des Tommies, vous, l'ami des Teutons Si vous aviez v�cu, si vous �tiez ici C'est vous qui chanteriez la chanson que voici Chanteriez, en trinquant ensemble � vos sant�s Qu'il est fou de perdre la vie pour des id�es Des id�es comme �a, qui viennent et qui font Trois petits tours, trois petits morts, et puis s'en vont Qu'aucune id�e sur terre est digne d'un tr�pas Qu'il faut laisser ce r�le � ceux qui n'en ont pas Que prendre, sur-le-champ, l'ennemi comme il vient C'est de la bouillie pour les chats et pour les chiens Qu'au lieu de mettre en joue quelque vague ennemi Mieux vaut attendre un peu qu'on le change en ami Mieux vaut tourner sept fois sa crosse dans la main Mieux vaut toujours remettre une salve � demain Que les seuls g�n�raux qu'on doit suivre aux talons Ce sont les g�n�raux des p'tits soldats de plomb Ainsi, chanteriez-vous tous les deux en suivant Malbrough qui va-t-en guerre au pays des enfants O vous, qui prenez aujourd'hui la cl� des cieux Vous, les heureux coquins qui, ce soir, verrez Dieu Quand vous rencontrerez mes deux oncles, l�-bas Offrez-leur de ma part ces "Ne m'oubliez pas" Ces deux myosotis fleuris dans mon jardin Un p'tit forget me not pour mon oncle Martin Un p'tit vergiss mein nicht pour mon oncle Gaston Pauvre ami des Tommies, pauvre ami des Teutons...
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